Epurations et Révocations

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Un maire nommé, c'est un maire à la botte du pouvoir. C'est un maire dont on est sûr que sa "couleur politique" n'est pas à l'opposé de celle de Paris. Les préfets, personnel mobile par excellence, ont donc pour charge de trouver le maire en fonction du régime. Tantôt royaliste, tantôt républicain, parfois bonapartiste. Le maire, tant qu'il est nommé devra donc prêter serment de fidélité à l'Empereur, au roi, au prince-président ou au maréchal Pétain.

Qui dit nomination dit aussi révocation . A chaque changement de régime correspond une révocation et donc une épuration du corps municipal. La révocation est un pouvoir discrétionnaire sous le Premier et le Second Empire. Les motifs sont donc généralement politiques. Sauf circonstances exceptionnelles, telles que la révocation des maires communistes en 1939 et l'éviction des maires "vichyssois" en 1944, les motifs d'ordre politique ne sont plus suffisants pour la révocation des maires.

Selon que le régime est autoritaire ou se veut libéral , l’étendue de ses pouvoirs et la manière dont il les exerce varient sensiblement. Il n’est pas indifférent, à cet égard, qu’on choisisse, comme ce fut le cas sous la monarchie de juillet, les maires au sein du conseil municipal ou qu’on puisse les nommer hors de celui-ci, comme s’en attribuèrent le droit le Premier empire, la restauration et le Second empire.

Deuxième République : Révocation sur avis du Conseil d'Etat

Depuis 1884 : Révocation par décret motivé

Depuis 1982 : Révocation par décret en Conseil des ministres

C’est au chef de l’Etat que, de manière constante, depuis l’an VIII, il incombe de les révoquer.

Texte de loi

Article

Contenu

Décret des 14-16 frimaire an II (4-6 décembre 1793)

article 2, section IV

Epuration des maires : "achever sans délai l'épuration complète de toutes les autorités constituées"

Lettre des 20 juillet et 12 octobre 1815

 

Donne aux préfets le pouvoir de suspendre et remplacer les maires.

Arrêté du 10 mars 1848

 

Révocation de tous les maires et conseils municipaux remplacés par des commissions municipales.

Circulaire du 29 juin 1849

 

"Lorsqu'un acte d'hostilité au gouvernement a démontré cette nécessité, toute hésitation serait de la faiblesse".

Circulaire du 31 juillet 1881

 

Atteste la cessation de la mobilisation des maires au service de la candidature officielle.

 

Les motifs de Révocation

Aussi souvent que reviennent tout au long du XIXe siècle les remplacements autoritaires de maires dus aux circonstances politiques, ils ne doivent pas nous dissimuler le fait que les motifs purement administratifs de révocation ont été plus que fréquents et nombreux.

Le premier motif : Complicité active ou passive du maire avec des jeunes de leur commune désireux de se soustraire à la conscription: délivrance de faux actes d’état civil, non dénonciation des déserteurs, exemption de service contre argent.

Second motif : Le refus de concours du maire aux agents de contributions indirectes.

Troisième motif : Le refus d’exécuter les ordres de l’administration, ou l’attitude hostile à son égard, l’utilisation des fonctions pour l’obtention d’avantages personnels, la carence dans l’exercice des pouvoirs de police…

Les autres motifs :

 

REVOCATION

1837 à 1840

1849

1850

Motifs politiques

17

47

44

Abus de pouvoir

26

18

22

refus d'exécuter les lois et les actes de l'autorité supérieure

57

54

18

Malversation, mauvaise gestion des intérêts communaux

23

7

1

Délits et abus en matière de recrutement

14

2

1

Violences, difficultés de caractère, défaut d'accord avec le conseil municipal

22

8

2

Incapacité ou incurie

12

8

4

Déconsidération, résultant de la conduite privée ou actes étrangers à leurs fonctions

10

16

8

Condamnations judiciaires, disparition ou abandon de son poste

19

31

9

Total

200

191

109

 

Graphiques

Mais cela ne doit pas occulter un autre phénomène général : celui de la permanence des maires, y compris d’un régime à l’autre, notamment dans les communes rurales. Il y a à cela de multiples raisons dont l’insuffisante attractivité de la fonction résultant de son bénévolat et des ennuis qu’elle procure.

Au long du siècle, tous les responsables départementaux ont été confrontés à ce difficile problème : trouver pour leur exercice des fonctions municipales des candidats compétents. A défaut il a fallu se résoudre à laisser vacants des postes de maire ou d’adjoint.

Compte tenu de ces difficultés, on comprend que, lorsque la préfecture a trouvé est assurée de la relative qualité d’un maire, elle le garde. Et celui-ci de son côté, s’il n’est pas politiquement très engagé, s’accommode des changements de régime. Beaucoup de maires ruraux sont, encore aujourd’hui, difficiles à classer politiquement, oscillant entre centre gauche et centre droit. Ils n’en sont pas moins d’excellents gestionnaires, que l’administration apprécie, et qui entretiennent avec tous les préfets qui passent, représentants de gouvernements de nuances politiques diverses, les meilleures relations.

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